Notes Déontologiques / Enrique Pardo
Ma position concernant la certification « Professeur de Voix Roy Hart », qui est le nom habituel utilisé par la plupart des enseignants et le grand public, est la suivante.
Premièrement : l'idée d'une institutionnalisation de l'enseignement de Roy Hart est relativement récente (à peine dix ans) et repose sur le modèle de la leçon de voix individuelle - qui est à la fois un modèle psychothérapeutique et musical : professeur et élève en huit clos avec un piano, pendant une heure. Ce modèle, que je qualifie de "canonique", est la référence sur laquelle repose la certification corroborée par le Centre Roy Hart.
Cela dit, lorsque j'ai rencontré Roy Hart (de 1968 à sa mort en 1975), il enseignait presque exclusivement dans des séances de thérapie de groupe, par la parole. Le travail vocal effectué par ses proches collaborateurs devait servir de facilitateur et de moteur psychosomatique pour ces réunions en groupe. Par conséquent, son enseignement était fondamentalement interprétatif (herméneutique). Un professeur « Roy Hart » devrait pouvoir prendre en compte ces facettes psychothérapeutiques comme fondamentales dans un travail intitulée Roy Hart.
Il convient également de noter que Roy Hart ne parlait pas de « leçon de voix » mais de « leçon de chant » : c'était un choix philosophique et militant. C'est dans ce sens que je parle d’un « modèle canonique » de la leçon de chant qui se doit d’inclure l'étude de ses fondements psycho-philosophiques.
Un jugement de valeur. La proposition de Roy Hart, singing, le « chant », est simple, directe et géniale : chanter, c'est réaliser la transformation performative d'un sentiment, d'une idée, d'une fiction. Il s'agit aussi d'explorer, de « chanter » la part d’ombre de l'humanité : nos limites et nos résistances. Dans le poème dont Roy Hart a fait son manifeste, (Biodrame, de Serge Béhar, 1972) il est écrit : « J'ai agressé mon corps pour me rapprocher de toi ».
Une remarque importante : je n'ai pas connu le maître de Roy Hart, Alfred Wolfsohn (1896 - 1962) et je ne fais pas non plus référence aux racines historiques de sa pensée dans le romantisme allemand, ou dans la psychosomatique du début du XXe siècle. Il faudrait également inclure leur héritage talmudique (les deux étaient juifs) et, dans le cas de Roy Hart, le modèle de Georg Gurdjieff (1866 - 1949).
Une conclusion : l'idéalisme de Roy Hart fait partie intégrante de mon propre travail. Et bien que cinquante ans se soient écoulés depuis sa mort, et que j'aie beaucoup voyagé sur le plan artistique et philosophique, la leçon de chant de Roy Hart reste fondamentale, et je ressens même une certaine obligation de transmettre son essence et sa pratique à mes collaborateurs et aux artistes pour lesquels les idées et les idéaux comptent autant que la pratique.
J'ajouterais aujourd'hui que le travail dit "Roy Hart" est la "thérapie expressive" la plus riche et profonde qui existe. Mon accent va bien sûr vers l'expressivité, raison pour laquelle je considère ce travail comme préalable indispensable au mien dans Panthéâtre
Pour avoir une idée des implications, des controverses et des points de vue sur la mise en place d'un schéma institutionnel « Roy Hart" » vous pouvez consulter les archives (sur demande) ainsi que ma première version éditoriale de 2015 qui inclut un portefeuille d'articles et d'échanges. Voir aussi mon BLOG, thème ROY HART et/ou VOICE. |